Le Manoir de l’Estracelles

Le petit manoir-ferme de l’Estracelles ( « estra » : la route, « cella » : construction, cave ) est situé dans les anciens marais de Beuvry, qui restent un site boisé très agréable. Ces vestiges sont uniques dans notre région rasée par les guerres et industries.

On y accédait jadis depuis le village sur la colline par une petite route empierrée, en cul de sac, plantée de grands peupliers des marais. Un pont-levis sur douves en eaux, qui l’isolaient de toutes parts, en défendait l’entrée par porche couvert, fortifié.
C’est ce passage qui est la plus ancien vestige avec sa salle forte de plain-pied, avec la cour pavée que fermaient deux portails. Trois meurtrières ouvrent dans le pignon Nord. Au dessus, la salle forte est également défendue par des meurtrières sur trois côtés. On y accédait par une seule trappe, dans son sol pavé, qui pouvait servir d’assommoir en cas d’attaque par des malandrins. Contigu à ce passage qui portait colombier seigneurial, à pas de moineau, le logis fut d’abord simple, sans doute à tourelle extérieure sur la cour, avec escalier à vis.
En 1629, l’aile en équerre fut édifiée et conserve, restaurée à 80%, une monumentale cheminée gothique dans un décor de peintures murales à rinceaux de feuillages habités d’oiseaux de chasse. La grande cheminée de la première salle a malheureusement disparu. Le manoir a subi les outrages de l’impôt sur les portes et fenêtres dans la destruction des grandes baies, identiques à celles du rez-de-chaussée, heureusement préservées en partie. Tous les communs ont disparu après la guerre. Le logis comporte quatre salles dont une cave, un étage de trois chambres et de vastes combles.
A l’état de ruines, voué à la démolition imminente et au dépeçage des amateurs de pierres et bois anciens, ce modeste manoir fut l’objet depuis 1973, d’une longue et difficile restauration à court de finances, mais conforme à ce que fut jadis cet édifice de style flamand pur. Les toitures étaient aux trois quarts disparues et les charpentes, planchers, menuiseries, en ont énormément souffert.
En 1974, la restauration du logis fut interrompue par le démontage et la récupération d’une première grange à Fouquereuil.
En 1976, une troisième récupération de grange, beaucoup plus importante encore, se fit à La Flandrie, hameau de Lillers. Entre temps, le bâtiment de Fouquières était restauré et remonté. Ces granges sont du XVIIIème siècle.
Cet important travail ne fut possible que par l’aide bénévole d’un maçon et d’un charpentier en retraite, qui travaillèrent à longueur d’année. Leur nom, qui reste attaché au Manoir d’Estracelles, est Monsieur Léonce Marche de Beuvry et Monsieur Auguste Delansay de Béthune.
Les travaux de restauration du logis ne reprirent qu’en 1979, après la finition des granges. Toutes les toitures couvertes tant bien que mal en 1973 avec l’aide d’enfants du pays, furent démontées, restaurées, remontées. Les huisseries du rez-de-chaussée ont été refaites identiques à ce qu’elles furent à l’origine, grâce à des témoins d’époque retrouvés, dans les murs. La cheminée gothique fut refaite identique à elle-même avec ses matériaux retrouvés sur place après l’effondrement voulu par les voleurs de ferraille. Un nombre incalculable de brèches aux murs intérieurs et extérieurs furent bouchées, des voûtes de caves remontées, les pas de moineau des pignons et trois souches de cheminée sur toits refaits par une entreprise équipée d’échafaudages.